le cloud computing déclencheur de la mutation profonde des DSI (2/2) – Morning 01 Business

Si la première table ronde de cette matinée « morning 01 business » du 15 octobre a fait le tour de toutes les précautions à prendre – réelles ou supposées – pour bien lancer et réussir son projet de cloud computing, la deuxième fut vraiment visionnaire et fondamentale.

Ce compte rendu a été divisé en 2 parties. La première partie est disponible ici.

La table ronde, toujours animée par Frédéric Simottel, directeur de la rédaction de 01 Business était composée de (par ordre alphabétique) :

des critères d’achat complexes, pas toujours à la portée des utilisateurs

Hubert Tournier a apporté un autre élément dans ce débat :

•\tHubert Tournier, DOSI adjoint du groupement des mousquetaires (Intermarché)
« les utilisateurs n’ont pas toujours le recul suffisant. Il y a de nombreux et complexes critères d'achat, dont conformité à la demande de besoin, la mesure de la performance, le caractère stratégique, la qualité de la maintenance, la pérennité de la solution … et ces éléments-là ne sont pas encore dans les gènes des utilisateurs et ils ne sont pas faciles à évaluer en outre ».

Donc, qu’on se rassure, le cloud computing ne signifie pas la mort de l’informaticien. Bien au contraire ; comme on le verra ensuite cela signifie plutôt le renouveau de sa fonction et une évolution radicale de ses missions.

Eric Tirlemont a ajouté une précision de poids, à savoir que le DSI doit intégrer un grand nombre de compétences variées : juridiques, techniques et même métier.

« D'un point de vue opérationnel, il est important de structurer le contrat pour prévoir la Réversibilité, et prévoir la capacité à réagir vite. C'est sur cette réactivité que le DSI est jugé et il faut prévoir cette réversibilité forte et rapide dans les contrats » a-t-il précisé. C’est ce genre d’exigences qui nécessite un recours à un panel très varié et étendu de compétences de la part des DSI.

la connaissance métier, de facto intégrée par les (bons) DSI

J’en ai fait le constat maintes fois dans ma carrière de maître d’ouvrage : il est fréquent de voir que ce sont les DSI qui maîtrisent le mieux les connaissances des processus métiers d’une entreprise, contrairement à l’image d’Epinal qui voudrait que le DSI ne comprenne rien d’autre que la technique. Ceci est tout bonnement dû au fait qu’un des métiers principaux du DSI est de modéliser les processus afin d’en permettre l’automatisation dans les systèmes d’information. Loin de la caricature habituelle du technicien enfermé dans sa bulle, mon expérience de MOA m’a montré que bien souvent, ce sont eux qui connaissent le mieux les métiers. Pour moi, cette opposition métier/DSI n’existe pas, elle n’a pas lieu d’être, ni de la part de la MOE, ni de celle de la MOA.

après les métiers, c’est aux informaticiens de voir leurs tâches automatisées !

Thierry Rambert revient sur ce qui a changé dans la vie d'un DSI et notamment en dehors de la réversibilité.

« la capacité à nouer des contacts au plus haut niveau chez les fournisseurs. Il y a des gens qui aiment changer des cartes mère, et maintenant on leur demande de gérer des contrats avec des SLAs et cela demande une montée en compétence ».

Voilà le véritable enjeu du Cloud computing, un enjeu organisationnel et humain qui demande aux DSI de changer de rôles, et de s’éloigner de plus en plus de la technique. A terme, je pense que cela veut dire que la distinction MOA et MOE devrait disparaître. Il y aura d’une part le métier, dont le rôle est de vendre-marketer-gérer etc. et d’autre part les informaticiens qui vont de plus en plus se transformer en MOA. La nécessité d’avoir un « traducteur » de besoins en dehors de la DSI ne devrait plus être aussi impérieuse, du fait du cloud computing, qui oblige les informaticiens à externaliser les aspects techniques au profit de l’interface avec les métiers. D’ailleurs, dans le monde anglo-saxon, cette dichotomie MOE/MOA n’existe pas.

Mais ce changement est-il si nouveau que cela ?

Jean-Pierre Savi n’en est pas si sûr :

Jean-Pierre Savi, directeur Marketing des solutions cloud computing infrastructure d’Orange
« cela existait déjà avant » a-t-il déclaré, « mais le rôle du DSI s'est déplacé et on lui demande de plus en plus des engagements de service. Le DSI à un nouveau rôle et nous [en tant que fournisseur], nous devons nous adapter à ce nouveau rôle et nous poser la question de quels outils nous pouvons mettre à disposition de ces nouveaux DSI. Nous devons donc définir des offres qui vont dans ce sens et cela change le paradigme » a conclu Jean-Pierre. 

Hubert Tournier ajoute :

•\tHubert Tournier, DOSI adjoint du groupement des mousquetaires (Intermarché)
« pour la première fois, on parle d'automatiser le métier des informaticiens après avoir automatisé des métiers ! C'est beaucoup moins drôle pour nous ! Tout ce qui était fait à la production et qu'on faisait avant, tout est automatisable. Le tuning, le support là c'est différent, on va sous-traiter. Pour la partie ingénierie on s'aperçoit que les équipes n'ont pas toujours envie de se positionner non plus. Alors on se demande ce qu'ils vont faire. Idem pour les juristes qui avaient l'habitude de faire des contrats individuels sur mesure, et maintenant ce n'est plus la même chose ».

Là est l’enjeu majeur, un enjeu qu’on a connu sur les tâches les plus faciles à automatiser de l’entreprise, et qui atteint aujourd’hui les informaticiens eux-mêmes, pas toujours prompts à accepter ce changement qu’ils ont pourtant imposé aux autres au cours des 30 années précédentes.

vers des services informatiques sur catalogue interne … payants !

Thierry Rambert enfonce le clou :

« le Cloud va-t-il permettre aux DSI de vendre leurs services sur des catalogues ? Je pense qu’ils sont en retard, car ils deviennent des fournisseurs de services du numérique à l'intérieur de l'entreprise et on va commencer à les voir faire payer leurs services et à les facturer en interne aussi. Et pourquoi pas avec l'extérieur aussi ? (NDLR c’est déjà le cas de Proservia, DSI de Manpower et SSII, qui d’ailleurs se base sur l’offre Flexible Computing Express d’Orange). Le but c'est d'avoir une parfaite connaissance de mes clients et certains des fournisseurs vont aussi devenir des fournisseurs d'IT dans le cadre des grands groupes ».

Certes, toutes les DSI ne pourront se transformer en SSII, surtout à l’extérieur, le reste du débat s’est un peu perdu autour de cette question d’ailleurs. Mais peu importe, car cette grande révolution que les métiers appelaient de leurs vœux dès le milieu des années 80 et qu’on n’en finissait pas d’attendre arrive enfin, c’est un véritable séisme, mais c’est aussi un moyen pour les informaticiens de jouer un rôle beaucoup plus haut de gamme, basé sur le service et sur le soutien aux utilisateurs. Les changements que nous allons vivre au sein des pools informatiques des 5 prochaines années n’ont pas fini de nous étonner.

Yann Gourvennec

Ce compte rendu a été divisé en 2 parties. La première partie est disponible ici.
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compte rendu de la première table ronde de cette matinée « morning 01 business » :
deux pros du voyage s’attaquent aux mythes du cloud computing – Morning 01 business (1/2)
deux pros du voyage s’attaquent aux mythes du cloud computing – Morning 01 business (2/2)

crédit photo : © shockfactor - Fotolia.com

Yann Gourvennec

Je suis spécialiste en systèmes d'information, marketing de la highTech et Web marketing. Je suis auteur et contributeur de nombreux ouvrages et Directeur Général de Visionary Marketing. A ce titre,  je contribue régulièrement sur ce blog pour le compte d'Orange Business sur les sujets du cloud computing et du stockage dans le cloud.