Cloud souverain : pourquoi Gaia-X va réussir ?

Le projet de Cloud souverain européen est lancé. Mais il ne faut pas s’y tromper : Gaia-X n’est pas un projet défensif vis-à-vis des hyperscalers. C’est avant tout un projet qui mise sur l’ouverture, les services et l’innovation pour porter haut les valeurs de l’Europe dans le Cloud et rééquilibrer la valeur que l’Europe tire de ses propres données.

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L’objectif n’est pas de recréer un « hyperscaler », mais bien de créer un écosystème connectant producteurs et consommateurs de données européennes dans un environnement de confiance – et, au passage, de donner visibilité et cohérence aux offres Cloud qui existent déjà en Europe.

La fondation Gaia-X compte 22 membres fondateurs, dont Orange. Ce noyau dur, précurseur d’une communauté qui s’étoffera bientôt, comme cela sera illustré lors du second sommet Gaia-X du 17 novembre prochain, et sans nul doute largement, se compose depuis six mois de 11 entreprises françaises et 11 allemandes. Il ne s’agit pas uniquement d’acteurs majeurs du Cloud, mais aussi d’industriels tels qu’EDF, Amadeus, Safran ou BMW, tous d’importants consommateurs de services Cloud. Une telle organisation signifie que les entreprises utilisatrices ont voix au chapitre de façon équilibrée dans la structure.

Gaia-X arrive à un moment clé de la transformation digitale

Cette nouvelle phase officialisée pour le projet Gaia-X marque la volonté de l’Europe de reprendre l’initiative dans un domaine clé pour son avenir. Les entreprises européennes et notamment françaises adoptent désormais massivement le Cloud. Si une minorité s’oriente actuellement vers une approche 100 % Cloud public, la plupart a adopté une approche hybride, avec à la fois l’usage de ressources privées et le recours au Cloud public. Les entreprises misent ainsi sur la complémentarité entre des ressources internes, souvent dédiées à des usages et aux données les plus sensibles, et des ressources publiques potentiellement illimitées en quantité de stockage et en puissance de traitement. Le curseur se tournera de plus en plus vers le Cloud public, compte tenu de l’agilité et des services additionnels et innovants qu’il met régulièrement à disposition.

On observe également que cette stratégie privilégie de plus en plus le MultiCloud. Après avoir longtemps choisi un opérateur Cloud unique pour monter en compétence vis-à-vis de cette nouvelle approche de l’IT, les entreprises privilégient aujourd’hui une approche multi-fournisseurs. C’est un moyen pour elles tout autant de minimiser les risques de « vendor lock-in », de renforcer la résilience de leur solution globale, que de mettre en compétition les prestataires afin de bénéficier des meilleures conditions commerciales et surtout des dernières innovations dès qu’elles apparaissent.

Un regain d’intérêt des entreprises pour des services cloud de confiance

Cette nouvelle phase de maturité du marché du Cloud computing a également mis en exergue la dépendance numérique des entreprises européennes, ainsi que leur difficulté à créer de la valeur à partir de leurs données les plus sensibles sans risquer de les exposer à des législations beaucoup plus intrusives que celles de l’UE. Cela constitue incontestablement une fenêtre d’opportunité pour Gaia-X, lui permettant de trouver sa place aux côtés des « hyperscalers ». Dans ce contexte, la stratégie d’Orange, qui consiste à être un opérateur d’infrastructures Cloud et de services Cloud (sur tout type d’infrastructures, pas seulement celles d’Orange), se voulant agnostique en termes de technologies pour ses clients, est sans aucun doute un atout face à cette stratégie multi-cloud des entreprises.

On estime que dès 2025, 60 % des données générées dans le monde seront issues des entreprises, un taux qui n’était encore que de 30 % en 2015. Cette croissance porte actuellement le marché du cloud mais il est maintenant acquis que les entreprises ne placeront pas en l’état l’ensemble de leurs données dans le Cloud public pour des raisons de confidentialité. Pour les entreprises européennes, les informations d’ingénierie liées à la R&D, contrats internationaux en cours d’élaboration, dossiers de M&A en cours d’étude ou autres données soumises à des contraintes réglementaires fortes, n’iront pas chez les hyperscalers d’origine extraeuropéenne, notamment ceux soumis au « Cloud Act » américain.

Orange Business estime par exemple que le marché de la souveraineté (stockage, traitement, analyse) concernera entre 15 % et 25% du marché global français, et concernera en priorité le secteur public, les Opérateurs d’Importance Vitale, et différents secteurs réglementés (santé, finance, aéronautique…). A l’instar du RGPD qui se révèle in fine un atout pour les citoyens et les entreprises en Europe malgré ses exigences contraignantes, les règles qui matérialiseront les exigences de souveraineté numérique à l’échelle européenne permettront aux membres européens de Gaia-X de se positionner en tant qu’acteurs d’un écosystème de données et de services Cloud de confiance, visibles par rapport aux offres des hyperscalers.

Gaia-X devra avant tout miser sur l’innovation

Pour autant, Gaia-X n’est pas un projet défensif et les hyperscalers sont les bienvenus dans le dispositif s’ils sont prêts à contribuer, notamment au travers de leurs services hébergés en Europe, à la compétitivité et à la croissance européennes – et à condition de respecter les règles du jeu fixées par les européens. Beaucoup reste encore à inventer, mais on peut imaginer qu’une entreprise pourra à l’avenir se tourner vers des acteurs de confiance pour héberger ou traiter ses données sensibles, tout en faisant appel à des acteurs « moins souverains » pour ses services moins critiques ou pour traiter des données dont la sensibilité aura au préalable été « réduite » (par chiffrement, anonymisation, consolidation, etc.). C’est au travers de cette combinaison de tous les services numériques disponibles, mais assortis à des attributs clairs et transparents quant à leurs garanties d’étanchéité et de maîtrise des traitements (« environnement de confiance »), que Gaia-X libérera toute l’agilité requise par les entreprises.

L’ouverture que nous prônons au sein de Gaia-X doit pousser l’ensemble de l’écosystème Cloud européen à innover. Les hyperscalers lancent plusieurs dizaines de nouveaux services Cloud chaque année, mais l’écosystème numérique européen foisonne lui aussi d’innovations, quoique de manière nettement plus fragmentée. Combiner toutes ces innovations pour proposer le meilleur des services Cloud à nos clients, est un défi qu’Orange compte bien relever en collaboration avec la communauté Gaia-X, tout en faisant levier sur nos 5 000 collaborateurs des Orange Labs, sur la richesse de nos offres réseaux Orange et sur l’expertise en cyber-sécurité d’Orange Cyberdefense.

Les premiers services Gaia-X doivent être commercialisés dès 2021. Cette initiative est une formidable opportunité pour l’écosystème Cloud européen d’énergiser et de dynamiser la création de valeur grâce aux propres données et aux solutions de confiance de l’Europe, à nous de la saisir !

Cédric Prevost
Cédric Prévost

Ingénieur de l’école Polytechnique, j’ai travaillé 10 ans dans le secteur public, dans les architectures techniques et la sécurité au sein du Ministère de la Défense. DSI de la Présidence de la République de 2007 à 2011, je suis aujourd’hui responsable des services managés et de la sécurité Cloud chez Orange Business.