Construire des fondations solides pour vos services d’IA : comment l’infrastructure numérique peut soutenir votre stratégie data

Les données — et plus encore celles qui constituent la propriété intellectuelle unique de votre entreprise — sont le moteur de l’intelligence artificielle générative (GenAI). L’infrastructure numérique qui transporte ces données doit donc être conçue de manière rigoureuse pour accompagner les cas d’usage d’IA générative sur lesquels repose votre avenir. Votre capacité à y parvenir déterminera si votre infrastructure constitue un levier pour votre stratégie data… ou un obstacle.

Derrière l’enthousiasme généralisé autour de l’IA générative se cache une réalité souvent occultée : les grands modèles de langage auxquels la plupart des grandes entreprises ont désormais recours sont, par nature, des plateformes génériques.

Prenons une analogie : si deux plongeurs olympiques effectuent le même saut complexe, la différence ne viendra pas de la figure elle-même, mais de la manière dont ils l’exécutent. Il en va de même pour deux entreprises d’un même secteur qui souscrivent au même assistant IA : la performance ne dépendra pas de l’outil, mais de la capacité de chacune à exploiter un ensemble identique de fonctionnalités. En soi, la technologie ne garantit aucun avantage décisif.

Le véritable potentiel de l’IA se révèle lorsqu’elle est intégrée au cœur de votre organisation, connectée à votre propriété intellectuelle, au service de votre mission. Autrement dit : les outils et les algorithmes ne sont plus un facteur de différenciation — ce sont vos données qui le sont. Mais encore faut-il oser franchir ce pas.

Lors de conférences, j’interroge souvent le public : êtes-vous prêts à exposer le cœur de votre propriété intellectuelle à un service d’IA ? Peu de mains se lèvent, et c’est compréhensible. Il faut une dose de courage… ou d’inconscience. La différence entre les deux ? La confiance.

Un élément clé de la solution — ou du problème

Si vous misez l’avenir de votre activité sur un service d’IA à forte bande passante, pouvez-vous garantir que votre réseau absorbera cette charge sans ralentir le reste de vos applications ? Que votre infrastructure saura évoluer au rythme de vos ambitions IA ? Que vos systèmes de sécurité seront à la hauteur, alors même que la surface d’attaque s’élargit pour les cyberattaquants ? Que les données sur lesquelles vos LLM sont entraînés sont suffisamment fiables pour éviter des hallucinations qui pourraient nuire à votre réputation ? Et si l’ouverture de vos documents internes constitue un cas d’usage clé, vos mécanismes de gestion des privilèges sont-ils suffisamment sûrs pour garantir l’intégrité des informations sensibles ?

Si vous pouvez répondre « oui » à toutes ces questions, alors félicitations : vous avez déjà opérationnalisé un concept GenAI émergent en un service à l’échelle de l’entreprise. Mais rares sont les entreprises aussi avancées dans leur parcours. Si vous avez répondu « non » à au moins l’une de ces questions, vous n’êtes pas seul, mais il vous faut avancer avec prudence. Car si votre infrastructure est fiable, elle devient un accélérateur de votre stratégie data. Sinon, elle en devient le principal frein.

Restez calmes… et continuez d’avancer

Si vous n’êtes pas encore en mesure de faire tout cela aujourd’hui, pas de panique. L’exemple récent de DeepSeek illustre à quel point les dynamiques de l’IA peuvent évoluer rapidement — et de façon inattendue. Qui aurait imaginé qu’une start-up chinoise inconnue puisse, en une seule journée, faire chuter de plus de mille milliards de dollars la capitalisation boursière de géants comme Nvidia, Microsoft ou Alphabet ?

Comme une bonne idée qui ne fonctionne pas encore en pratique, un projet IA ne doit pas être abandonné sous prétexte qu’il n’est pas réalisable aujourd’hui. Mettez-le en attente : ce qui vous semble irréalisable ou trop coûteux aujourd’hui peut devenir tout à fait accessible dans six mois. Il n’y a pas si longtemps, les interactions vocales avec ChatGPT paraissaient trop complexes à déployer — elles sont aujourd’hui disponibles en standard via la plateforme Azure AI.

Des pépites à exploiter

Autre exemple parlant : les données non structurées — documents, présentations, mails — recèlent souvent des informations à forte valeur ajoutée. L’IA générative est capable de traiter une grande variété de formats, depuis les notes manuscrites jusqu’aux images et schémas techniques. Bien sûr, ces contenus devront d’abord être numérisés, stockés de façon sécurisée (ce qui nécessite une infrastructure fiable), puis intégrés à votre stratégie data. C’est un travail conséquent, mais il peut ouvrir la voie aux services GenAI les plus prometteurs.

Le cas d’usage le plus évident concerne la maintenance : imaginez un technicien sur site, équipé d’un assistant vocal GenAI, capable d’identifier l’équipement défectueux, de poser les bonnes questions à l’ingénieur pour établir un diagnostic, puis de fournir en retour les manuels ou les tutoriels nécessaires pour une réparation bien plus rapide que ce qu’il était possible de réaliser auparavant.

Le marketing offre un cas d’usage plus inattendu : certains directeurs marketing envisagent déjà de créer des jumeaux numériques de clients, pour développer des offres ultra-personnalisées. L’IA permettrait non seulement d’adapter les messages mais – parce qu’elle est générative – pourrait aussi produire des textes et visuels spécifiquement conçus pour chaque client. Cela suppose de charger dans le modèle une grande quantité de données structurées (comme les prix ou la disponibilité des produits) et non structurées (comme les publications sur les réseaux sociaux des clients), en veillant bien sûr à les sécuriser. L’impact potentiel sur la performance marketing pourrait être considérable.

Toutefois, aucun de ces cas d’usage ne pourra être déployé du jour au lendemain. La réussite dépendra en grande partie d’une conduite du changement efficace, indispensable à la compréhension et à l’adoption des outils. Sans oublier une question cruciale : comment évaluer la qualité des données non structurées ? Comment distinguer les mails riches en informations de ceux qui n’apportent rien ? (Nous travaillons avec nos clients sur ces problématiques, mais les réponses ne sont pas évidentes.)

Cela étant dit, si cette vision est la vôtre, vous pouvez y travailler par étape, quels que soient les défis rencontrés. Commencez par ce qui est réalisable dès aujourd’hui — la technologie finira par rattraper vos aspirations, probablement plus vite que vous ne l’imaginez.

Grandir, non sans douleur

Le manque de maturité du secteur se mesure notamment à la place occupée par les architectes (concepteurs de modèles complexes) dans les projets IA actuels. En temps normal, les ingénieurs sont bien plus nombreux car les principes de conception logicielle sont largement maîtrisés, et l’essentiel des ressources est consacré au développement. Mais aujourd’hui, les entreprises cherchent encore à comprendre comment concevoir leurs services IA : on assiste donc à un ratio quasi égal entre architectes et ingénieurs.

Nous avons pleinement conscience de ces défis et nous faisons tout pour aider nos clients à les relever. Cela guide par exemple notre sélection de partenaires au cœur de l’écosystème IA. Comme toujours, Orange Business reste ouvert aux talents et privilégie les meilleurs acteurs du marché. Nous portons une attention particulière à ceux qui offrent un haut niveau d’interopérabilité. Nous savons que l’intégration des différentes composantes d’une structure cohérente est souvent l’un des plus grands défis auxquels sont confrontés nos clients.

Pour une organisations agile, le changement est une opportunité, pas une menace

Il y a trente ans, les premières entreprises créaient leur site web. À cette époque, il était impossible d’imaginer les services — e-commerce, réseaux sociaux, streaming — qui font aujourd’hui partie de notre quotidien. Nous en sommes là avec l’IA générative. Une chose est certaine : l’avenir de cette technologie ne ressemblera pas à ce que nous imaginons aujourd’hui.

Les outils et les méthodes de demain seront très différents de ceux que nous utilisons aujourd’hui : nous serons témoins d’avancées inattendues. Des modèles de langage plus compacts verront le jour, avec des besoins en calcul réduits avec des coûts moindres et une empreinte carbone allégée. Dans ce contexte, l’agilité est essentielle. Notre enquête mondiale menée par GlobalData révèle que la dépendance à un modèle fondamental d’IA générative est l’un des principaux sujets de préoccupation pour les décideurs, juste derrière la gestion des données et l’intégration des systèmes existants. A ce titre, les leaders de la GenAI sont conscients de devoir rester flexibles.

Le meilleur conseil que je puisse donner à ceux qui cherchent à opérationnaliser un service GenAI est de faire preuve d’audace et de construire une infrastructure fiable à la hauteur de leurs ambitions en matière de stratégie data. Et si rester attentif aux perspectives de demain est important, n’oublions pas — pour reprendre les mots de Gandhi — que « l’avenir dépend de ce que nous faisons aujourd'hui ».

Pierrick reglioni

Pierrick Reglioni dirige le domaine Data & AI pour les services digitaux d'Orange Business en Europe.
Il possède 15 ans d'expérience dans le domaine des données et de l'IA, accompagnant de nombreuses entreprises tout au long de leur parcours data.

Lorsqu'il ne travaille pas, il passe des heures à jouer du piano et du jazz. En fouillant un peu sur Internet, vous trouverez certainement quelques vidéos et albums ici et là.