DIAS : croiser les données pour créer la valeur

Initié par la commission européenne afin d’observer la terre dans des objectifs environnementaux, sécuritaires et humanitaires, le programme Copernicus est une gigantesque mine de données collectées par des satellites, qui en fournissent plus de 10 pétaoctets par an : comment stocker, trier, agréger, analyser et valoriser toutes ces données ? C’est pour répondre à cette problématique que la plateforme DIAS (Data Information Access Services) est créée par le consortium Airbus Defence and Space - Orange et leurs partenaires Capgemini, CLS et Vito.

Je vous explique dans cet article le fonctionnement de la plateforme DIAS, dont l’ouverture aux utilisateurs est programmée en juin 2018. Vous pouvez revoir le webinaire du mardi 13 mars 2018 de 11h30 à 12h15 que j’ai animé avec Guillaume Nevicato, Cloud Transformation Manager d’Orange Cloud for Business : « Data Intelligence : transformer les données en avantage concurrentiel ».

Premiers traitements de la donnée collectée

Les informations collectées par les satellites Sentinel du programme Copernicus sont utilisées notamment dans 6 « core services » : terres émergées, marine, atmosphère, climat, urgences et sécurité. Pour chacun de ces core services, et à partir des données fournies par l’ESA, des consortiums mandatés par l’Union Européenne vont élaborer des produits à valeur ajoutée. Par exemple dans la marine, des cartes de courant seront créées à partir des données récoltées par les satellites, ou dans le core service « climat » seront produites des cartes climatologiques. Ces produits sont aujourd’hui accessibles à tous, du citoyen à la multinationale.

Faciliter l’accès et l’utilisation des données

Ce premier travail permet de rendre la donnée plus lisible, mais il ne garantit pas sa facilité d’accès et d’utilisation. En effet, pour chaque core service, plusieurs centaines de types de produits sont ainsi créés et stockés par les consortiums à travers différents hubs de données répartis dans les pays européens. L’accès aux données est éparpillé et il est peut être compliqué pour l’utilisateur de trouver ce dont il a besoin.

DIAS répond à ce problème en regroupant et en rendant disponibles tous ces produits : les hubs étant multiples et spécialisés dans un core service particulier, DIAS réunit et référence les données de ces hubs via un guichet unique, facilitant leur accès aux acteurs publics et privés.

Croiser les données pour enrichir l’information

Les données récoltées par les satellites Copernicus et celles élaborées par les core services ne sont pas les seules sur la plateforme DIAS. En effet, l’intérêt d’une telle plateforme est de croiser les données issues des satellites à un vaste ensemble de données complémentaires. Cela donne lieu à une « cross-fertilisation », apportant une richesse d’informations disponibles dans le catalogue DIAS. Parmi celles-ci, on retrouve des données :

  • Issues d’autres capteurs spatiaux (CNES, DLR, etc.),
  • Fournies par Airbus via la plateforme One Atlas,
  • Météorologiques,
  • Géopolitiques,
  • IOT, issues de capteurs et de drones,
  • Fournies par Orange, notamment les données « Flux Vision », qui une fois anonymisées permettent d’observer le déplacement des personnes,
  • Etc.

Ces données, ouvertes ou non, permettent aux utilisateurs de la plateforme DIAS de croiser différentes informations et de créer ainsi un service à valeur ajoutée qu’ils peuvent utiliser ou revendre. En effet, DIAS offre toutes les ressources (processing et stockage) et moyens nécessaires (API, services managés, bibliothèques de traitements de données spatiales, etc.) aux fournisseurs d’applications pour le développement, le déploiement et les opérations de leurs services.

Des objectifs de développement économique

Ces services à valeur ajoutée, que les développeurs peuvent librement créer, font partie des objectifs de la commission européenne, qui a initié ce projet dans le but de stimuler l’économie par la donnée. En effet, des acteurs qui ne sont pas experts du spatial peuvent bénéficier de données facilement exploitables et se concentrer sur l’innovation, grâce à un cumul de valeurs ajoutées permettant de passer à un niveau d’information supérieur.

Les exemples d’application sont nombreux : développement urbain, smart city, gestion des écosystèmes, amélioration de la circulation, analyse poussée des zones de chalandises, etc. Les API prêtes à l’usage permettront aux entreprises de proposer de nouveaux services et de créer, selon les estimations de la commission européenne, 48 000 emplois d’ici 2030.

Un projet de plateforme ouverte et un business model bien établi

Le développement et la maintenance d’une telle plateforme représentent un investissement conséquent, que le consortium que nous avons formé avec Orange doit pouvoir rentabiliser. Le projet est financé pour une durée de 4 ans par l’Union Européenne, il est donc nécessaire de créer un business model afin de générer un chiffre d’affaires. Le choix d’une plateforme ouverte au plus grand nombre permet de stimuler la production de services, sur lesquels le consortium prélève un pourcentage de la vente par le développeur. Cela rendra possible la rentabilisation du travail de collecte des données, de leur croisement et de la maintenance des serveurs. A noter que ce projet fait partie intégrante de la stratégie des deux entreprises Airbus et Orange qui continueront à assurer ce service même si la rentabilité au terme des 4 années de subvention ne rencontre pas les objectifs visés.

Véritable outil de mise en valeur de données complexes, le cas de la plateforme DIAS montre le cheminement de la donnée brute à la création de nouveaux business. Au cœur de ce travail, la collaboration de nombreux acteurs est indispensable : ce modèle participatif pourrait bénéficier à long terme au dynamisme européen et à son positionnement au premier plan dans les services issus des nouvelles technologies.

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Webinaire
Data Intelligence : transformer les données en avantage concurrentiel
Mardi 13 mars 2018 de 11h30 à 12h15

 
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Anne Chanié

Je suis responsable « Segment Sol d’Observation – nouveaux concepts », au sein d’Airbus. Je travaille plus particulièrement sur les concepts de segments sol d’observation basés sur les nouvelles technologies du numérique : traitements massifs de données, technologies Cloud et Big Data (IA).