Comment choisir sa solution de management de l’innovation ?

On assiste depuis quelques années à l'émergence de solutions de management de l'innovation (SMI), définies par leur capacité à générer des initiatives et à piloter la mise en œuvre des innovations dans une organisation, de manière collaborative et ouverte. Dès lors, comment se repérer dans cette offre foisonnante ? Quelles sont les fonctions incontournables ? Comment les distinguer et les choisir ?

Elles sont un des leviers majeurs pour la transformation et l'agilisation des entreprises, en favorisant l’écoute des salariés et la circulation des idées. Elles sont aujourd'hui incontournables pour toute entreprise désireuse d'activer l'intelligence collective, notamment auprès de ses collaborateurs. Que ce soit pour bâtir une feuille de route, améliorer le time-to-market d'un produit, résoudre des problèmes de fonctionnement, il est devenu évident que l'innovation ne peut se passer d'une certaine industrialisation dans la recherche et le suivi de projets innovants ou d’amélioration continue.

Un marché dynamique

Le marché mondial était estimé en 2016 à environ 150 millions de dollars (Etude Gartner, juin 2017). En France, le marché est modeste en termes de poids mais gagne en maturité. Il est encore fragmenté et dominé par des acteurs de petite taille, essentiellement français (Ayno, Assembl, IDHall, Yoomap, Seemy, Agorize…), à l'exception de quelques gros éditeurs internationaux (Hype, Qmarkets, Brightidea…).

Le marché change progressivement d’échelle et de nouvelles solutions continuent à apparaître, sous l'effet de 3 tendances :

  • La capacité pour ces outils à être exploités dans des programmes plus larges visant à soutenir l'innovation de façon pérenne au sein des entreprises (innovation salariée, programme d'intrepreneuriat…)
  • Des déploiements couvrant toute l'organisation, et non plus quelques entités
  • Une utilisation sur le long terme, sortant des premières phases d'expérimentation

Des périmètres divergents entre idéation et mise en œuvre

Formellement, on distingue les fonctions d'idéation pure (faire émerger et identifier les meilleures idées) de la gestion du portefeuille d'idées (valoriser et suivre la mise en œuvre des idées retenues).

Dans l'idéation, on considérera toutes les fonctions propres à :

  • mesurer l'engagement des collaborateurs et le volume des idées
  • inspirer les acteurs (tout ou partie de l’organisation) sur une thématique choisie, par l'apport de contenus d'experts ou l'intégration d'une veille via l'apport d'une application externe, des réseaux sociaux...
  • mobiliser les cibles grâce des fonctions de communication et d’animation (emailing, newsletter, notifications) qui permettent de rythmer la campagne sur des cibles choisies
  • déposer des idées, de façon plus ou moins qualifiée selon le degré de structuration voulu
  • générer de la collaboration pour enrichir les initiatives, par des commentaires, des likes, de la gamification
  • repérer les idées innovantes (et les innovateurs actifs) grâce à l'ajout de critères et des filtres

Tous les éditeurs proposent de telles fonctions, la différence entre les solutions se situant généralement dans le niveau d'autonomie laissé à l'entreprise pour paramétrer ses campagnes et s'approprier la plateforme, pouvant aller jusqu'à une intégration en marque blanche.

Il reste à proposer, sur cette partie idéation, une vraie expérience mobile et une meilleure intégration au SI qui n'en est qu'à ses balbutiements. On note toutefois des premiers cas d'usage intéressants avec des intégrations sur des réseaux sociaux d'entreprise (RSE) pour "viraliser" les idées et les campagnes auprès des collaborateurs ou pour authentifier automatiquement les accès à la plateforme (SSO). N’oublions pas que les RSE et autres plateformes collaboratives peuvent aussi outiller la génération d’idées grâce aux formulaires de dépôt d’idées, aux conversations. Certains éditeurs dans ce domaine, comme Jive, intègrent aussi des votes et des classements. Un bon moyen pour démarrer et tester la dynamique en interne.

Après la phase d'idéation

Les idées doivent ensuite être transformées en opportunités business. Sur ce sujet, le périmètre des solutions est davantage protéiforme et répond en fait à plusieurs types de besoins :

  • qualifier les initiatives retenues pour une éventuelle mise en œuvre. Grâce à l’analyse Gains/Efforts, calcul de ROI, l’entreprise est à même de prioriser ses projets de façon objective. Ainsi, une véritable cartographie des projets se dessine dans un portfolio des initiatives qu’il faut faire vivre.
  • Mobiliser les ressources : cela passe essentiellement par l'identification des compétences et la constitution des équipes qui vont devoir qualifier et mettre en œuvre les initiatives. Le matching automatisé des compétences facilite la rencontre des compétences déclarées et les besoins des projets.
  • Assurer la mise en œuvre des initiatives retenues. Sur ce point, les méthodes peuvent diverger. Certaines solutions imposent un cadre, généralement inspiré des méthodes agiles utilisées pour les idées innovantes : business model canvas, minimum valuable product, pitch... C'est un travail sur le fond de l'idée qui permet de générer un business case. Il s'agit ici de convaincre l'entreprise et de trouver les financements/ressources.

D'autres permettent de créer son propre workflow et de gérer le cycle de vie d'une idée conformément à la culture de l'entreprise. L'idée est alors vue comme un projet avec des phases, des tâches, des délais, des responsables, des rôles. Le tout entièrement paramétrable et, si possible, en mode management visuel (Kanban, Trello…). L’outil permettra ainsi de suivre la progression de l'idée dans l'organisation

  • Mesurer le potentiel et les ROI des projets innovants : grâce à l’ensemble des indicateurs consolidés, les solutions se transforment alors en véritable dashboard de l’innovation (taux d’approbation des projets, taux de transformation, taux d’engagement, origine fonctionnelle/géographique des projets, statuts d’avancement, calcul des gains engendrés…)

L’avenir ? Mettre l’idéation au cœur de tous les process de l’entreprise

Les éditeurs visent des améliorations sur les points suivants :

  • l’accès en mobilité à travers des apps
  • une plus grande flexibilité dans la personnalisation des workflows
  • l’inter-opérabilité avec les outils métiers (via API) et l’intégration à l’écosystème collaboratif de l’entreprise pour ses rapprocher des espaces de conversation naturels déjà utilisés (SharePoint, Jive, Yammer…).
  • plus d'intelligence artificielle pour semi-automatiser les conclusions des débats, suggérer des rapprochements de projets ou d'équipe, pour modérer et réutiliser les idées dans d’autres contextes Côté usages, les entreprises cherchent à maximiser la valeur des outils en les utilisant dans plusieurs configurations :
  • les challenges internes faisant appel aux seuls collaborateurs, en déclinaison de thèmes impulsés par l’entreprise ou de façon libre et spontanée,
  • l’hybridation des sources de créativité avec l'apport de l'extérieur dans les campagnes internes (clients, étudiants, partenaires, start-ups…)
  • le mix online/offline pour maximiser des événements physiques, tels que des ateliers créatifs ou des hackathons augmentés.

Choisir une solution c’est d’abord s’interroger sur ses objectifs

Les fonctions d’idéation, de collaboration autour des idées sont désormais banalisées. Les points différenciant vont venir des fonctions de maturation, de priorisation et de reporting de ces idées. Au final, le périmètre couvert par les solutions est très varié et toute entreprise désireuse de se lancer dans une acquisition doit d'abord identifier ses objectifs, ses cas d'usages...

Outre des points d'attention classiques (la couverture fonctionnelle, l'expérience utilisateur, le coût...), les critères de choix tiennent à votre stratégie et votre maturité en matière d'innovation :

  • Innovation uniquement interne ou ouverte à l'écosystème de l'entreprise,
  • Innovation spontanée (au fil de l'eau, sans thématique imposée) ou provoquée (dans le cadre d'un défi par exemple),
  • Dispositif durable ou campagnes one-shot.

Avant de vous lancer, quelques recommandations :

  • Identifier des scénarios d'utilisation en s'appuyant sur les possibilités offertes par votre process d'innovation, l'engagement des collaborateurs, les critères d'évaluation et la culture projet à l'œuvre dans l'entreprise,
  • tester les outils via des POC,
  • s'assurer du sponsorship du top-management qui doit appuyer pour aligner process, budgets, outils...

Enfin, le succès d'un programme de gestion de l'innovation dépend rarement de la seule technologie. Il exige une volonté au plus haut niveau pour encourager l'innovation, une culture qui encourage les collaborateurs à générer des nouvelles idées, à les accueillir favorablement dans l’organisation avec des moyens et une gouvernance dans la mise en œuvre. Nos entreprises y sont-elles vraiment préparées ?

Pour aller plus loin :

Innovation collaborative : pourquoi lancer un challenge idéation ?

Les 7 règles d’or de l’idéation en entreprise

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Cyril Castelnaud

Au sein d’Orange Consulting, j’imagine des solutions innovantes de collaboration et de communication pour accompagner nos clients dans leur transformation digitale. J’interviens sur des problématiques de digital workplace, réseaux sociaux d’entreprise et plateforme d’innovation, en plaçant l’humain au centre de la démarche.