Transformation digitale : l'industrie des médias face à la révolution des usages

Sur smartphone ou tablette, en direct ou en catch-up, les modes de consommation des contenus médias ont radicalement changé. Comment monétiser ces nouvelles audiences ? Les infrastructures télécoms tiendront-elles la charge ? Diffuseurs, éditeurs et opérateurs ont témoigné de leur expérience lors du Cercle Media, une matinée organisée par Orange.

Un algorithme pour retenir les abonnés

Premier constat : la collecte des données doit permettre d’offrir au spectateur une expérience à la fois personnalisée et globale. « Une fois que nous avons identifié un fan de la série Clem, nous lui proposons sur MyTF1 un « preview » de l’épisode à venir. Il pourra ensuite regarder l’épisode en direct le lundi soir et prendre de l’avance en achetant en VoD l’épisode suivant, encore inédit, ou alors se replonger dans la saison précédente grâce au replay », détaille Hugues Laigneau, directeur produits digitaux, marketing digital & data du groupe TF1.

La box, une mine de données

Un opérateur télécom peut aider les médias dans l’enrichissement de la data. « En tant que gestionnaire de réseau, nous disposons de multiples données  », observe Ludovic Levy, vice-président, global data strategy & governance d’Orange. « La box est au cœur du foyer, elle connecte les différents terminaux de la famille. » Bien sûr, cela ne peut se faire qu’avec le consentement explicite et éclairé de l’utilisateur, dans le respect de sa vie privée. L’essor de l’intelligence artificielle est source aussi de belles promesses. Avec IBM, Fox l’utilise pour optimiser les bandes annonces de ses films en analysant les éléments qui retiennent l’attention du spectateur. De son côté, Guillaume Boutin, directeur marketing Canal +, imagine déjà un bracelet connecté capable d’évaluer l’état émotionnel du spectateur au visionnage d’un contenu.

Le smartphone remplace la caméra

En attendant, le partage des émotions se fait sur les réseaux sociaux. Des médias testent de nouveaux formats conçus spécifiquement pour des plateformes comme Periscope (Twitter) et Facebook Live. Une manière de toucher des jeunes qui ont délaissé la TV, en se démarquant de ses codes. Un smartphone  tendu sur une perche remplace alors la caméra. Le magazine Maghreb Orient Express (MOE) sur TV5 Monde propose ainsi des reportages à Tunis ou à Rabat, où le journaliste doit gérer le flux vidéo, interagir en direct avec les internautes, et modérer leurs propos. « La vidéo vise l’authenticité, l’interactivité, l’intimité en nous amenant dans les coulisses d’un événement », plaide Edouard Braud, strategic partner manager media France de Facebook.

Vivement 2020 et la 5G

Avec le développement de la vidéo, fortement consommatrice de bande passante, les infrastructures tiendront-elles ? Elles devront évoluer. Cisco propose aux médias de passer, comme NBC Sports l’a fait pour les Jeux Olympiques de Rio, au full IP. Le cloud et la virtualisation des réseaux offrent aussi des possibilités de « scalabilité ».

Pour Laurent Lemaire, au business development d’Orange Business , tout est une question de moyens. « Pour la retransmission de l’Euro 2016, nous avons posé l’équivalent de deux fois le tour de la Terre en kilomètres de fibre redondée ». Il mise aussi beaucoup sur la 5G attendue en 2020. Avec un débit jusqu’à cent fois plus rapide que la 4G pour un temps de latence extrêmement réduit, ce réseau de cinquième génération permettra de télécharger un film en quelques secondes ou de tenir les promesses placées dans la réalité virtuelle.

Du téléachat sur M6 au Elle Café

C’est bien de développer de nouveaux usages mais encore faut-il les monétiser. A cet égard, Lagardère Active a su faire fructifier ses marques. A partir de Doctissimo, le groupe a créé un site de vente en ligne de produits de parapharmacie et de médicaments sans ordonnance (DoctiPharma) et un site de prise de rendez-vous (MonDocteur) gratuit pour le patient mais payant pour le médecin.

M6 a débuté sa diversification de façon plus classique avec le téléachat. Le succès de M6 Boutique, lancée en 1988, ne s’est jamais démenti. « La force du concept, c’est le sourcing. Nous proposons des produits innovants que l’on ne trouve nulle part ailleurs », souligne Ronan de Fressenel, DG de Ventadis, le pôle vente à distance du groupe qui représente 15 % de son chiffre d’affaires.

M6 Boutique c’est aussi un site d’e-commerce, une application mobile, un réseau de magasins physiques. Ventadis vend également des produits dérivés de ses émissions comme des livres Top Chef. En rachetant monAlbumPhoto, la société a investi le créneau de l’impression photo avec une usine de 5 000 m2 en propre.

Comment aligner l’éditorial et le commercial ?

C’est la tâche à laquelle s’attelle Renée Kaplan, Head of audience engagement au Financial Times. Son équipe composée de data scientists, d’experts en SEO ou en marketing digital aide la rédaction à mieux diffuser ses contenus. En fonction de l’actualité et de ce qui se dit sur les réseaux sociaux, quel sujet faut-il traiter ? Sous quel format ? Et  pour quel terminal ? La data prend le relais de l’instinct éditorial. Pour les fidéliser, le quotidien économique britannique note même ses lecteurs en fonction de la fréquence de visites sur le site, le temps passé ou le nombre d’articles lus.

Xavier

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Xavier Biseul

Spécialiste de la transformation numérique des entreprises, je collabore à plusieurs sites IT, je traite des impacts du cloud, du big data ou de l’intelligence artificielle sur les différents modèles économiques. Pendant une quinzaine d’années, j’ai accompagné l’aventure 01, de l’hebdomadaire 01 Informatique à 01Business.com dont j’étais le chef d’édition.