Le Big Data se met au service du tourisme

La révolution du Big Data est actuellement à l’œuvre dans les très nombreux secteurs économiques. Je vous propose de regarder comment celle-ci s’applique dans l’un des secteurs majeurs de l’économie française : celui du tourisme (plus de 7% du PIB et 7% des emplois, d’après la direction générale des Entreprises).

 

Le Big Data : une révolution engendrée par le mobile et le cloud

La révolution du Big Data est alimentée par un double phénomène :

  • d’une part, l’abondance de données engendrées par les citoyens, massivement équipés de smartphones, qu’ils consultent en moyenne plus 150 fois par jour (correspondant à une durée cumulée de deux heures et demie)
  • et, d’autre part, les formidables puissances de calcul disponibles dans les datacenters.

Sur le papier, ces technologies permettent déjà d’ « industrialiser le sur-mesure » en adaptant de mieux en mieux l’offre à la demande ou les moyens de production à la rareté des ressources économiques et écologiques disponibles. Mais, sur le papier seulement, car seule une fraction de ces cas d’usage imaginés par les services marketing vont effectivement trouver un marché et prouver leur utilité … dans des proportions souvent bien supérieures aux premières attentes.

Comme toute innovation majeure, la révolution du Big Data apporte également son lot d’inquiétudes bien compréhensibles quant à la difficulté pour le citoyen de contrôler l’usage qui est fait de ses données. Le déploiement de ces technologies s’accompagne donc de mise en place de règles et de contrepouvoirs bien identifiés :

  • dans les démocraties européennes ayant combattu, puis vaincu les grands totalitarismes du XXème siècle, des dispositifs équivalents à la Loi Informatique et Liberté de 1978 ont posé un cadre que la CNIL ou ses équivalents nationaux à l’étranger sont chargés de faire respecter ;  
  • dans d’autres territoires, les enjeux de développement économique ou de protection des populations conduisent les pouvoirs publics à des arbitrages de natures  différentes ;
  • mais partout s’établissent des équilibres entre consommateurs et entreprises dans lesquels les uns expriment un désir ambivalent de simplicité (je dois pouvoir tout faire en un clic) et de transparence (je dois pouvoir comprendre), tandis que les autres cherchent à la fois à construire et à développer une relation de confiance et à optimiser leurs investissements.

Les statistiques, un outil indispensable aux secteurs du tourisme et de l’aménagement du territoire

Les professionnels du tourisme et en particulier les organismes publics qui en sont chargés (ministère, Atout France, comités régionaux, agences départementales…), opèrent dans un monde assez particulier en comparaison de secteurs relevant plus traditionnellement de l’économie de marché :

  • ils agissent pour séduire des « clients » (les visiteurs d’une région, d’un parc naturel…) se déplaçant dans un milieu très ouvert. Autrement dit, ils ne connaissent que très imparfaitement leurs « cibles » ;
  • ils engendrent de l’activité économique pour de très nombreux partenaires publics, et plus souvent encore pour les acteurs privés (restauration, hébergement, commerce, musées …) qui certes produisent des recettes fiscales mesurables, mais ne vont pas – pour des raisons aussi bien concurrentielles que techniques – jusqu’à partager les informations dont ils disposent ;
  • enfin, ils contribuent au rayonnement de leur territoire et à la diffusion de la connaissance historique et environnementale, d’une façon plus difficilement mesurable encore.

Pour allouer les bons efforts de promotion ou d’investissement aux bonnes activités ou pour établir un retour d’expérience efficace, il est donc essentiel de disposer des statistiques les plus fiables à des échelles adaptées de temps (saison, journée, voire au quart d’heure pour certains évènements) ou d’espace (de la région au quartier d’une ville).

Mais, paradoxalement, c’est quand on dispose de statistiques que les ennuis commencent, puisque, lorsque l’on cherche à mesurer la même chose de deux façons différentes, on trouve rarement le même résultat ! Plusieurs cabinets de conseil travaillent donc à réconcilier ces informations et à les croiser avec des données qualitatives. Ce type d’étude est (et sera) évidemment toujours utile, mais elles sont difficiles à industrialiser … Ou plutôt, elles l’étaient, avant que le Big Data ne fasse son entrée dans le paysage.

L’exploitation des données mobiles anonymisées : une révolution pour le tourisme

Les algorithmes permettant de produire des analyses de fréquentation et de déplacements de population entre différentes zones touristiques fonctionnent sans base de données.  Ils ne font finalement que compter, comme lorsque vous évaluez la longueur d’une file d’attente avant d’opter pour la plus courte.

Mais l’enjeu majeur du Big Data n’est pas de compter pour compter, mais de le faire pour que les données obtenues aient un sens. Par exemple, les indicateurs réalisés pour le secteur touristique lors de l’élaboration de l’offre commercial Flux vision,  sont :

  • les résidents (qui vivent sur le territoire à l’année)
  • les touristes (qui y passent au moins une nuitée)
  • et les excursionnistes (qui y passent seulement une journée)

Le résultat de ces analyses est assez spectaculaire : antérieurement, les statistiques n’étaient disponibles qu’annuellement, après plusieurs semaines de dépouillement d’enquête de terrain.

Aujourd’hui, grâce au Big Data, les agences régionales et départementales du tourisme disposent de statistiques quotidiennes, et même de représentations dynamiques montrant comment évolue la fréquentation des territoires par type de population par plage de deux heures. Grâce à cela, il est dès lors possible de mesurer les retombées économiques pour la vie économique locale et d’élaborer de meilleures offres afin d’apporter un service plus adapté à ces visiteurs.

L’analyse des flux touristiques par origine ou par destination s’avère notamment fort utile pour comprendre la façon donc le les lieux sont fréquentés, et de mieux définir, par exemple, les endroits où seraient implantés les futurs bâtiments d’accueil des touristes, ou les horaires et les lieux les plus pertinents de travail.

Ce type de données est également très utile aux décideurs (les élus), qui peuvent ainsi compléter leurs analyses avec des éléments factuels et allouer plus efficacement l’argent public aux activités offrant la plus grande utilité.

L’ajout d’information socio-démographique permet d’adresser de nouveaux secteurs d’activité 

La magie des statistiques est ainsi faite qu’il est également possible de compter – toujours de façon anonyme - non plus uniquement le nombre de personnes, mais également le nombre d’hommes, de femmes, de personnes par tranche d’âge, ce qui ouvre évidemment des perspectives pour de nouveaux usages.

Nous voyons en 2015 de très nombreuses entreprises déployer ce type de solution dans les secteurs de plus en plus variés : aménagement du territoire, transport, exploitation de lieux ouverts au public…

Après l’utilisation des données de mobilité, la valorisation de celles-ci

Nous voyons aussi de nombreuses entreprises intéressées par la valorisation de leurs propres données pour leurs propres besoins. Elles sont conscientes que ces données créeront de l’utilité (et donc des revenus potentiels) si elles sont utilisées par d’autres agents économiques.

Typiquement, dans le secteur du tourisme, il sera un jour possible de faire le lien entre fréquentation, données d’environnement (horaires de transport, météo) et retombées économiques effectives auprès des acteurs privés.

De nombreux exemples montrent en effet que lorsqu’une nouvelle source de donnée s’interconnecte à un écosystème, elle créée souvent une externalité positive : son propriétaire en tire en bénéfice et cela crée de l’utilité pour d’autres.

 

Olivier Ondet

Pour aller plus loin :

Témoignage de la Compagnie du Mont Blanc

Flux Vision

Olivier Ondet

Je suis Directeur du programme Datavenue et IoT B2B d' Orange Business.
A l’heure de la généralisation des smartphones et des tablettes, du NFC, du cloud, des réseaux sociaux, du Big Data, nous percevons tous les enjeux de la construction de relations à la fois plus interactives, personnalisées, ergonomiques mais aussi plus humaines. Parlons-en !