Vaincre la mort, le défi du siècle

Le défi est lancé. Allons-nous vaincre la mort avant la fin du siècle ? Est-ce réaliste ? Est-ce souhaitable ? L'homme peut-il gagner ce pari ? Des géants comme Google se lancent dans l'aventure. Mais avant de considérer les aspects scientifiques, ce pari soulève de nombreuses questions éthiques avec des répercussions sociales, économiques et religieuses.

Sommes-nous les derniers hommes « bio » ?


Au début ce fût quelques aides externes comme les lunettes et les appareils auditifs; puis quelques implants pour améliorer la mécanique et la tuyauterie (implants cochléaires, pacemakers, stents, prothèses de hanche...). Il y a aussi le téléphone portable, véritable prolongement de notre mémoire avec son répertoire, ses notes et de notre culture avec l'accès permanent à Internet. Les objets connectés seront l'étape ultime avant le début de l'hybridation. Il est donc aujourd'hui légitime de se poser la question de savoir si nous sommes les derniers hommes "Bio".

le transhumanisme en marche


Hybridation, implants, manipulations génétiques ... Le mouvement est en marche pour améliorer nos performances et notre espérance de vie en bonne santé. Ces avancées scientifiques sont porteuses d'espoir mais plus que jamais, la question des dérives se pose.

Le progrès est inéluctable. L'aspiration de l'homme à vivre plus longtemps et en meilleure santé esst irrépressible. Sa volonté d'être plus performant en recourant à des apports externes est constante. Il est donc urgent d'anticiper les dérives. On doit garantir l'accès universel aux nouvelles thérapies. Il faut prévenir les tentations d'eugénisme. Il convient d'être particulièrement attentif aux recherches portant sur l'intelligence artificielle. Cette anticipation ne peut être efficace que si la réflexion et la législation est mondiale. Il ne doit pas y avoir demain de "paradis éthiques", comme il y a aujourd'hui des paradis fiscaux.

Papi et Papa ont le même âge


Au delà des nombreuses questions éthiques se posent également des questions sociales, politiques et économiques. Avant de vaincre la mort, une première étape est de comprendre, puis de stopper le processus du vieillissement. Quand cela arrivera, à quel âge allons nous choisir de nous arrêter de vieillir ? Dans une société où potentiellement, nous pourrons tous avoir vingt ans, il sera très perturbant que tous les membres d'une même lignée affichent le même visage juvénile sur les photos de famille ! Et quid de toutes les conséquences politiques : démographie, chômage, système de retraite, dépenses de santé... Tout sera à réinventer.
Au regard de ces questions, on peut se demander si tout cela est raisonnable. Ce questionnement est vain. La science est en marche et rien ne l'arrêtera.

1914, 2014, 2114


Pour se donner une idée des progrès à venir, imaginez la France de 1914. Nous sommes à l'aube de la première guerre mondiale. Quelques rares voitures disputent le pavé parisien aux attelages hippomobiles. Les poilus sont loin d'imaginer qu'il ne faudra que cinquante ans à l'homme pour marcher sur la lune et maîtriser l'atome. Ils ne se doutent pas que les avions, l'ordinateur, la télévision, le téléphone, Internet révolutionneront le monde et que les chercheurs décrypteront le génome humain, ouvrant la voie à de nombreuses applications thérapeutiques.

Nous sommes en 2015. Notre socle de connaissances est immense et nous disposons d'outils de recherche mille fois plus sophistiqués qu'à l'époque de Pasteur (1849/1865), d'Alzheimer (1864/1915), de Max Planck (1858/1947), ou de Marie Curie (1867/1934). Les avancées seront donc inimaginables. Une chose est sûre, le monde dans lequel vivra l'homme de 2115 sera bien différent du notre.

De multiples étapes jalonnent le chemin de l'immortalité. Elles se succéderont ou s'entrechoqueront.

  • Guérir à 100% : Il faudra d'abord vaincre le cancer. Maîtriser les pathologies liées à la pauvreté et à l'ignorance. Il faudra soigner l'Alzheimer, car à quoi bon vivre longtemps si on n'en a pas conscience.
  • Une guerre sans fin : Quand nous saurons guérir les maladies à 100%, il faudra anticiper la mutation des virus, garantir l'efficacité des antibiotiques, identifier les nouvelles menaces qu'elles soient liées à l'environnement, aux OGM, à la conquête de l'espace, au terrorisme bactériologique...
  • Changer de paradigme : De curative, la médecine sera de plus en plus préventive, voir prédictive. Le Big Data, les Med Tech, la télémédecine, la thérapie géniques, les nano particules joueront un rôle crucial pour aboutir à ce changement de paradigme.

Ce n'est qu'une fois ces étapes maîtrisées, que les vrais bouleversements interviendront. Les spécialistes situent cela à l'horizon 2040. Cela concernera l'amélioration des performances humaines, l'avancement voir l'aboutissement des travaux sur la sénescence et les progrès de l'intelligence artificielle. D'ici là, d'autres ruptures technologiques changeront encore la donne.

Elon Musk, patron de Tesla : "Je pense que nous devrions être très prudents à propos de l'intelligence artificielle. C'est notre plus grande menace existentielle !"

Bill Gates : "Je suis de ceux qui s'inquiètent de la super-intelligence... Et je ne comprends pas pourquoi les gens ne sont pas inquiets"

Ray Kurzweil - Google : "En 2045, l'intelligence artificielle sera un milliard de fois plus puissante que l'ensemble des cerveaux humains"

Sergei Brin - Actionnaire Google : "Nous ferons des machines capables de raisonner et de faire les choses mieux que nous"

et l’homme dans tout ça ?


A partir de quand, l'homme perd son humanité, c'est la grande question.

On peut avoir toutes sortes d'aides et de prothèses pour améliorer son confort, ses performances ou son espérance de vie, tant que l'on garde son libre arbitre, on reste profondément humain. L'intelligence artificielle et les logiciels implantés d'aide à la décision risquent de modifier cet état de fait. N'hésitez d'ailleurs pas à ce sujet à visionner l'interview d'Axel Kahn.

Imaginons un soldat face à son ennemi. Entre l'analyse de la situation, la prise de décision de tirer et le doigt qui se raidit sur la gâchette, il y a un laps de temps. Celui de la conscience. Pour réduire cet espace temps qui peut être fatal aux combattants, les militaires travaillent sur des logiciels d'aide à la décision. Là est le vrai danger. Le jour où ce laps de temps n'existera plus, nous aurons perdu notre libre arbitre. Nous aurons perdu notre humanité.
 
Jean-Claude.

 

crédit photo : © pixarno
 

Jean-Claude Durousseaud

La qualité d'une réunion c'est d'abord son contenu et la pertinence des problèmatiques posées, c'est pourquoi je privilégie une approche journalistique dans tous les sujets que j'aborde. Organisateur de congrès, j'essaye de créer des opérations fortes de sens en privilégiant le contenu sans pour autant négliger la forme.