Votre prochain véhicule incarnera-t-il la transition énergétique ?

La COP26 n’a peut-être pas confirmé l’engagement évident et souhaité par beaucoup, à savoir de réels engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais les promesses qui en sont ressorties s’orientent vers une réduction durable de l’utilisation des combustibles fossiles. Toutes ces idées font partie du processus de transition énergétique mondial du carbone vers des sources plus durables. Pourtant, deux éléments menacent leurs bénéfices : l’ampleur et le coût de la décarbonation, ainsi que la nature imprévisible et volatile des énergies renouvelables.

Le coût de la décarbonation

pBloombergNEF estime que pour atteindre le « zéro émission », le secteur de l’énergie nécessitera, d’ici 2050, entre 92 000 et 173 000 milliards de dollars d’investissements en infrastructures. Cela représente ni plus ni moins qu’un doublement des investissements actuels.

Une partie du défi consiste à réutiliser des systèmes et processus existants. Seb Henbest, Economiste en chef chez BloombergNEF, a indiqué à Raconteur, « qu’il existe un problème de taux de variation. Obtenir une technologie à moindre coût est une chose, mais vous devez ensuite la déployer à travers l’économie mondiale pour remplacer les infrastructures de production à fortes émissions de carbone. Cela prend du temps. »

La nature imprévisible des énergies renouvelables

Au cœur des stratégies « zéro émission », les énergies renouvelables pèchent cependant par leur imprévisibilité. Les rendements variables du solaire et de l’éolien représentent un défi par rapport aux modes de production traditionnels. Merveille technologique du XXᵉ siècle, les réseaux centralisés de production et de distribution peinent à faire face à l’introduction d’autres sources d’énergie et manquent de moyens pour stabiliser des flux d’énergie imprévisibles.

C’est là que les réseaux intelligents entrent en scène. Plus connus sous le nom de smart grids, ils utilisent les données et technologies numériques et sont conçus pour gérer les flux variables et bidirectionnels de l’électricité et les informations que ces nouvelles formes d’énergie génèrent.

François Bélorgey, vice-président du développement et de l’innovation au sein de la division Technology and Global Innovation d’Orange, l’a constaté dans un blog l’an passé : « un réseau intelligent est un système de distribution d’énergie produite et stockée, géré de manière à limiter les pertes de puissance en se basant sur des données prévisionnelles et en temps réel, et en intégrant les informations récupérées auprès du client final. En réalité, la principale différence entre un réseau électrique traditionnel et un réseau intelligent est que ce dernier est équipé d’un système d’information utilisé de façon dynamique en temps réel, grâce à la 5G, aux réseaux de capteurs IoT, à l’informatique de pointe, aux data lakes dans le cloud, aux dispositifs de RV/RA (réalité virtuelle/réalité augmentée) et à la sécurité IT/OT. »

Et les résultats sont probants. Un déploiement aux Pays-Bas a associé chauffage, refroidissement, électricité, hydrogène, rendement énergétique, stockage et mobilité afin de mettre en place un système sur mesure pour les villes et quartiers intelligents, l’ensemble étant géré par une couche numérique d’intelligence artificielle. Le rendement potentiel atteindrait les 80 %, réduisant la facture énergétique de 20 %.

Pourquoi le stockage est-il si important pour les réseaux intelligents ?

Le stockage offre une réponse au défi de l’intermittence de la production d’énergies renouvelables. En récupérant l’énergie pendant la production, les réseaux peuvent la stocker en cas de nécessité. Cela signifie que les heures de pointe de la journée sont couvertes, y compris lorsqu’il fait nuit et qu’il n’y a pas de vent.

Il existe actuellement six technologies majeures de stockage électrique : le stockage thermique, le stockage d’énergie à air comprimé, l’hydrogène, le stockage d’énergie par pompage hydroélectrique (PHES), les volants d’inertie et les batteries. Lorsqu’il s’agit de batteries, on parle de systèmes de stockage d’énergie sur batterie (BESS), les batteries lithium-ion étant les plus largement utilisées, particulièrement dans les véhicules électriques (VE).

En ce moment, le PHES représente environ 96 % de la capacité mondiale de stockage d’énergie et 99 % du volume mondial de stockage d’énergie. Ce système fonctionne en utilisant deux réservoirs situés à différentes altitudes : l’énergie est générée par le flux descendant de l’eau déversée du réservoir supérieur vers le réservoir inférieur. Les turbines et générateurs convertissent l’énergie en électricité et l’eau est à nouveau pompée vers le réservoir supérieur. Cependant, cette technologique requiert des caractéristiques géographiques particulières, ce qui la rend onéreuse pour desservir tous les lieux couverts par les réseaux intelligents nationaux.

Les batteries, clé de la transition énergétique

Les BESS sont quant à eux beaucoup plus petits et ne dépendent ni de la présence d’équipements supplémentaires et ni de la géographie (c’est-à-dire, une alimentation en eau et un différentiel d’altitudes) alors qu’une partie des véhicules électriques, totalement mobiles, offrent aux réseaux une capacité supplémentaire de stockage flexible. Les ventes de ces véhicules devant augmenter de plus de 25 % par an d’ici 2030, il pourrait y avoir un nombre non négligeable de solutions de stockage mobile en circulation.

Les BESS peuvent réapprovisionner le réseau en électricité via la technologie « vehicle-to-grid » (V2G). Le véhicule devra être à l’arrêt, non utilisé pour un trajet dans un avenir proche et sa batterie devra encore disposer de charge.

Cet aspect devra être déterminé par la partie « intelligente » du réseau. Le partage de données entre le véhicule et le réseau permettra de déterminer si le véhicule réapprovisionne le réseau en électricité ou stocke l’énergie dans la batterie. On estime que la plupart des véhicules domestiques sont stationnés 90 % du temps, il existe donc une opportunité évidente pour les réseaux d’utiliser les batteries des véhicules électriques garés lors des pics de demande.

En bonus : revenus complémentaires et seconde vie

À l’image des autres formes de reversement électrique vers le réseau (panneaux solaires domestiques), toute l’énergie pourrait se vendre, générant un revenu complémentaire pour les particuliers, ainsi que pour les entreprises possédant des flottes de VE.

Le BESS connaît également une vie après son utilisation dans le véhicule. Plutôt que d’être retraitées à mesure que de nouveaux véhicules entrent en circulation, les batteries peuvent finir leur vie en étant reconverties comme systèmes de stockage statiques. Ce faisant, elles offrent une capacité de stockage supplémentaire en vue d’augmenter la fiabilité du réseau. Elles peuvent également contribuer à accélérer le processus de charge d’autres VE, ces derniers pouvant directement y être connectées, plutôt qu’au réseau via les bornes de recharge.

La connectivité et le succès de la transition énergétique

Les réseaux intelligents nécessitent une connectivité fiable, avec la possibilité de partager des données entre la batterie, le véhicule et le réseau de manière fiable, constante et sûre. Tous les acteurs impliqués dans les réseaux intelligents, des agences gouvernementales aux régulateurs de l’énergie, en passant par les services publics et leurs partenaires technologiques, doivent s’assurer que les réseaux de communication existants intègrent la technologie 5G. Le déploiement continu de la technologie IoT constitue également un prérequis. Cependant, si elle est correctement mise en œuvre, une approche V2G, combinant l’adoption accélérée des VE et le déploiement des réseaux intelligents, pourrait jouer un rôle majeur en simplifiant la transition des sources d’énergie carbone vers les énergies renouvelables.

 

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