Une appli santé éloigne-t-elle le patient de son médecin ?

Grâce à la santé mobile, certaines visites onéreuses à l’hôpital pourront être évitées, les citoyens pourront mieux prendre en charge leur propre santé et leur bien-être, et la démarche préventive prendra progressivement le pas sur la démarche curative.”. Cet extrait d’un communiqué de l’Union européenne du 10 avril 2014 illustre l’ampleur des enjeux de la santé mobile pour des usages qui restent, selon la plupart des études, plutôt ponctuels et varient en fonction des populations concernées.

Sauf que c’est bel et bien la prise en main par chacun(e) de ses propres enjeux de santé qui explique comment la Suède, par exemple, a réussi à réduire jusqu’à 50% le nombre de nuits à l’hôpital et de réhospitalisation pour certains patients (Arthur D. Little, Machina Research). Mais cette appropriation par tous des applis et objets connectés va-t-elle finir par éloigner patients et professionnels de santé ? Rien n’est moins sûr…

piloter ses données santé depuis une appli


Le nombre d’applications santé est passé de 17 000 en 2010 à 100 000 en 2014. D’ici 2017, 3,4 milliards de personnes devraient avoir installé une application de santé mobile sur leur smartphone – soit un utilisateur de smartphone sur deux. Fait notable : 42% d’entre elles sont payantes (source : institut américain Research2guidance).

L’une des success story en ce domaine est l’application santé la plus téléchargée au monde, TactioSanté.

Développée par une société canadienne et disponible en 15 langues, TactioSanté a été classée “application médicale payante numéro 1” dans plus de dix pays. Elle compte aujourd’hui plus de 3,6 millions d’utilisateurs, que ce soit pour son service de base, gratuit, ou pour tous les services payants que l’appli propose, comme le suivi de maladies chroniques telles le diabète (TactioDiabetes).

Fonctionnant à la manière d’un dossier médical personnel, TactioSanté propose aux utilisateurs un tableau de bord unique permettant le suivi de ses données santé et l’intégration de différents résultats (pression artérielle, IMC, poids, cholestérol, etc.). L’une des particularités est que, contrairement à une grande majorité d’applications, elle peut se synchroniser avec les principales marques d’objets connectés, du coach électronique FitBit au bracelet Jawbone, en passant par la balance connectée Withings ou Wahoo captant votre IMC, iHealth ou les tensiomètres et autres podomètres.

Pour autant TactioSanté ne s’adresse pas qu’aux patients et vise à devenir l’appli par excellence de la relation entre patients et professionnels. En effet, elle dispose d’une version spécifiquement dédiée aux professionnels, TacTio RPM (pour Remote Patient Monitoring), reliée à la version grand public de chaque patient. Ainsi l’application relie le patient et son médecin.

L’engouement pour les applis santé s’accélère aujourd’hui également grâce aux objets connectés. Mais l’ancrage de cette tendance dans le temps ne peut venir que des professionnels qui s’approprient ces outils pour mieux répondre aux enjeux actuels de la santé.

quand les hôpitaux prêtent des dispositifs médicaux communicants


Une fois n’est pas coutume, les hôpitaux ont très tôt compris l’intérêt des objets connectés pour renforcer le lien avec les patients et permettre le suivi à distance. Ainsi de nombreux hôpitaux sont d’ores et déjà équipés d’objets connectés appelés dispositifs médicaux communicants (DMC).

C’est le cas du CHU de Clermont-Ferrand qui, dans le cadre d’un protocole de suivi à distance de patients atteints d’insuffisance cardiaque, prête un pèse-personne connecté pour les accompagner dans la prise en charge de leur maladie au quotidien.

Cela aurait permis, selon le CHU lui-même, de réduire en 2013 le taux de mortalité de ses patients de 30% à 12% ! Grâce à ce dispositif, le responsable du service de cardiologie, Jean Cassagnes, annonce par ailleurs une économie de 7000 euros par patient.

Même usage pour l’hôpital européen Georges Pompidou qui dispose d’une dizaine de tensiomètres connectés de la marque Withings prêtés aux patients pour qu’ils puissent “s’auto-mesurer” à domicile.

Ces exemples parmi d’autres montrent à quel point l’enjeu majeur se situe de plus en plus dans le resserrement du lien tissé via les objets et leurs applis entre le patient et le monde médical, médecin ou infirmière. Le professionnel de santé s’affirme dès lors comme facilitateur, mais aussi comme modérateur des usages de la santé connectée.

Anne-Yvonne.

 

crédit photo : © Monkey Business
 

Anne-Yvonne Halloux-Jahier

Au sein de l’équipe Market Intelligence (MI), direction Marketing & Connaissance Clients chez Orange, je suis chargée de veille sur les marchés télécoms et les usages du numérique pour la publication trimestrielle d'un document interne nommé Badim.
Les stratégies des opérateurs télécoms et les usages en matière de e-santé à l’échelle internationale font, à ce titre,
partie intégrante d’un programme plus global de veille des acteurs télécoms suivis par l’équipe MI.